Les Meubles du Pays de Rennes

© ANTIQUITÉS PHILIPPE GLÉDEL – TOUS DROITS RÉSERVÉS. 1998/2023

Philippe Glédel Antiques

Fronton d'armoire de François Allory - Collection personnelle

Préambule, Bibliographie et Remerciements.

Il a été déjà beaucoup écrit sur le mobilier rennais, notamment dans des collections générales sur les meubles régionaux. On y trouve souvent hélas de nombreuses approximations. On aura donc davantage intérêt à se tourner vers les publications locales. Nous proposons ici une bibliographie choisie des meilleurs ouvrages :
- Tout d'abord le plus ancien, "Les beaux meubles rustiques du Vieux Pays de Rennes", livre de référence écrit par un collectionneur passionné, le Docteur Jambon, édité chez Plihon & Hommay en 1927, réimprimé chez Laffitte en 1977. Ouvrage fort complet doté d'une importante documentation photographique et qui paraît avoir fixé la mémoire de toute une époque.
- Le plus récent, incontournable, "Menuisiers et mobilier du Pays de Rennes" aux éditions Apogée-1997, de Gwénaël Baron, en collaboration avec Alison Clarke, conservatrice à l'Ecomusée de la Bintinais. Ecrit cette fois par un universitaire, il s'agit d'un véritable livre d'investigation puisque de nombreuses archives notariales ont été compulsées. Cette publication nous a comblé, c'est en effet un ouvrage passionnant qui apporte de précieux renseignements et que nous ne manquons jamais d'offrir à nos clients et, bien entendu,
nous en recommandons la lecture à tous les amateurs. On y trouve entre autre une très belle étude sur Charles Allory, une liste des artisans élargie par rapport à celle établie par le Dr Jambon, quelques meubles inédits également, même si la place accordée aux photographies n'est pas prédominante.
- Le dossier de Paul Banéat, ancien conservateur du Musée archéologique de Rennes, intitulé "Le Mobilier Breton", aux éditions Massin en 1926, dresse un inventaire au travers de très belles photographies en noir et blanc.
- Dans la même veine, aux éditions des Musées de Rennes,
"Mobilier du Pays de Rennes" de 1970 par F. Bergot et J.-Y. Veillard, respectivement conservateurs du Musée de Rennes et du Musée de Bretagne.
- Quelques clichés inédits aussi à voir dans un exemplaire de Vie à la campagne intitulé "Maisons et Meubles Bretons Paysans et Bourgeois" de 1922, réédité en 1976 chez Hachette.
- Il ne faudrait pas oublier un très intéressant article sur les Croizé, par Jean-Yves Veillard, intitulé : "Une dynastie de menuisiers du pays de Rennes, les Croizé", édition des Musées de Bretagne.
- Enfin, un dossier sur le mobilier rennais auquel nous avons activement collaboré, dans le magazine France Antiquités de janvier 2005.
- Signalons aussi et pour finir un beau livre récent, "Le Mobilier Breton "par René Trotel, aux éditions Coop Breizh.

Ces livres constituent une véritable source d'enseignement, et il n'est pas question ici de répéter ce qui a déjà été écrit mais d'essayer modestement de compléter certaines parties avec ce que notre expérience d'homme de terrain nous a permis de découvrir. En effet, au cours de nos nombreuses années de quêtes, nous avons amassé une importante documentation photographique provenant de quelques collections privées, du marché de l'art et surtout de nos anciennes collections (on voudra bien excuser la qualité inégale de ces documents). Certains clients et amis nous ont incité à faire partager cette documentation, et c'est ce que nous nous proposons de faire ici, le net offrant un moyen parfaitement adapté, en confrontant nos propres archives à celles qui ont été éditées et en tachant d'apporter des éléments nouveaux.

Nous en profitons pour adresser un vif et sincère remerciement à nos clients qui nous ont permis de poursuivre notre passion, nous les savons comblés par les belles pièces qu'ils possèdent aujourd'hui et celà nous ravit. Nous ne voudrions pas manquer non plus d'évoquer la mémoire d'un personnage qui fut justement notre premier client : Henry Jouanolle, certains s'en souviennent sans doute encore, qui était le grand spécialiste du mobilier rennais. Possédant dans son magasin de Chantepie une fort belle collection ne comptant pas moins d'une vingtaine d'armoires rennaises, il se plaisait à dire qu'il n'en vendait pas une seule avant d'avoir au préalable trouvé sa remplaçante. Le marchand étranger (et "argenté") qui lui proposa un jour de lui acheter toute sa collection en un seul lot fut bien désappointé, le bonhomme refusa tout net. Voilà une petite histoire qui traduit la passion de cet amoureux du mobilier rennais, nous n'en verrons plus beaucoup "de ce tonneau là".

 

Qu'est ce que le véritable mobilier du pays de Rennes?

A notre époque, et comme beaucoup d'autres hélas, le terme "mobilier rennais" est un peu galvaudé et mis à mal, soit par manque de connaissance, soit par intérêt purement commercial. Faudra t'il créer un label ?
En effet, les meubles du département de l'Ille-et-Vilaine, généralement tardifs et très simples, pour ne pas dire stéréotypés, hormis peut-être pour quelques très rares meubles du pays de Vitré, sont souvent associés aux meubles de Rennes.
Cependant, sur les trois cent cinquante trois communes que compte le département, le mobilier rennais se circonscrit à moins d'une vingtaine de communes situées dans un mince "croissant fertile" localisé du nord au sud-ouest de la ville de Rennes.
Comme le souligne Gwénaël Baron, notre historien du mobilier rennais :

" Ce mobilier que l'on classe sous l'appellation "meuble du pays de Rennes" se caractérise par une série de traits bien particuliers :
- l'utilisation du merisier ...
- l'influence, au 18e siècle, des motifs décoratifs du style savant dans le décor du mobilier du pays de Rennes ... L'influence du décor parisien dénote en tous cas la grande perméabilité des campagnes rennaises aux modes extérieures.
- l'existence de quelques spécificités structurelles, la plus notable étant l'adoption de la corniche à double cintre au milieu du 18e siècle. Ce trait, unique en France, permet de reconnaître à tout coup une armoire du pays de Rennes
.
Ces structures et ce décor, élaborés sur l'armoire, se sont adaptés par la suite aux autres types de meubles. C'est cet ensemble de mobilier si bien caractérisé que les amateurs du début du siècle ont dénommé "mobilier du pays
de Rennes".
Une dernière particularité s'attache aux meubles du pays de Rennes : un grand nombre d'entre eux, le plus souvent les armoires, sont datés et signés par leurs auteurs. Il s'agit d'un phénomène remarquable et dont on ne connait pas d'équivalent à une échelle aussi importante dans le mobilier régional français ...
Le "pays de Rennes" (qui se situe dans le bassin de Rennes mais est plus limité) est donc bien loin d'être concerné dans sa totalité...la commune de Pacé est situés au centre géographique de cette zone. Elle a abrité à elle seule plus du quart des artisans localisés (17 sur 60). "

En bref, le mobilier rennais, très particulier, ressemble sans doute davantage au mobilier nîmois qu'à celui du reste de l'Ille-et-Vilaine. Pour l'anecdote, une commode de la région nîmoise est présentée dans Le Mobilier Breton de Balnéat ... Et de même nous avons acheté par le passé un lit à baldaquin rennais annoncé comme provençal par l'hôtel des ventes d'Avignon, pourtant bien spécialisé dans ce mobilier).
Mais apportons tout de même quelques précisions et "tordons le cou" à quelques idées reçues :

- certaines armoires ou meubles divers, n'adoptant pas la corniche à double cintre, peuvent être attribués au mobilier rennais.
- les meubles rennais n'étaient pas tous richement sculptés.
- le terme "brin de fougères" ne tient pas son origine de la ville de Fougères mais de la plante (parquetage en adoptant la forme).

Enfin, voici pêle-mêle un florilège de meubles dont l'attribution donnée au pays de Rennes peut être formellement rejetée.




Par simple indulgence, nous préférons déroger ici à la règle d'indiquer les sources de nos photos, signalons simplement qu'elles proviennent du net.
Nous voyons bien plutôt ici pêle-mêle du mobilier des pays de Vitré, Fougères, Dinan, et même jusqu'aux confins de Nantes (6) et de Loudéac (8).




 

La grâce de l'armoire Rennaise.

Si la renommée du meuble rennais a dépassé les frontières de la Bretagne, l'armoire en est bien entendu l'élément emblématique, c'est aussi le meuble principal, bien souvent offert aux jeunes époux. Durant la période prospère allant environ de la fin du XVIIIe siècle au premier tiers du XIXe siècle, les plus beaux spécimens se sont hissés au rang des plus riches meubles régionaux Français. On ne dédaigne pas d'ailleurs de les comparer aux provençales, arlésiennes ou nîmoises. Elles ont sans doute la même grâce, la même douceur dans le grain du bois, la même capacité à capter la lumière, à se patiner au fil des ans. Mais entre toutes, l'armoire rennaise se distingue par sa corniche double cintre si particulière. On n'en connait pas d'équivalentes en France coiffant les armoires, pas même celles des plus belles lyonnaises, dites "en arbalète". De nombreuses hypothèses ont été formulées sur son origine, sans jamais vraiment apporter de réponse documentée.

Au XVIIe siècle, le Baroque a influencé le goût français, en premier lieu l'architecture puis le mobilier. Forclos de Paris, il nous est venu par les grands ports de France et la situation particulière de la Haute-Bretagne, située entre deux des premiers ports de commerce français de l'époque, Nantes et Saint Malo, qui subissaient conjointement l'influence de l'Angleterre, des Flandres et de la Hollande, n'a pu être sans apports. C'est incontestablement à ce style venu de la mer que les menuisiers du pays rennais ont emprunté la fameuse corniche à double cintre.

Diverses photos, reproduites ci dessous, pour illustrer ce propos : deux meubles du début du XVIIIe siècle à corniche en double arc ou double cintre, le premier est un buffet flamand et le second un bureau-cabinet anglais. En dessous, l'interprétation qui en a été faite à Saint Malo, qui échangeait beaucoup avec les Flandres, puis à Nantes qui commercait à la fois avec la Hollande et l'Angleterre. Au centre, une armoire de Rennes du milieu du XVIIIe siècle, la parenté est évidente.

 
                       
               
Buffet flamand - Début XVIIIe
La Gazette Drouot
               
Scrinan anglais - Début XVIIIe
Le monde fascinant des antiquaires-Celiv
               
             
       
Armoire rennaise - milieu XVIIIe
Styles régionaux- L'illustration
   
                       
Buffet Malouin - Milieu du XVIIIe
Mobilier Breton - Ch. Massin
                       
Scriban nantais - Milieu du XVIIIe
La Haute Bretagne-Massin
 

Autre particularité de l'armoire rennaise, le travail de sculpture.
Il est bien entendu d'autres régions prospères où l'armoire de mariage atteignit des sommets de virtuosité, il faut citer Fécamp et Beaubec la Rosière en Haute-Normandie, Vire en Basse-Normandie, Arles et Nîmes en Languedoc et Provence, Lyon enfin. Il est entendu qu'il n'est pas question de comparer l'armoire rennaise à l'armoire normande par exemple, sujet trop général, et qu'il ne convient d'établir de comparaison qu'avec un centre de production, tel le bocage virois par exemple. Or, dans tous ces centres de fabrication, où le nombre de sculpteurs était au moins aussi important qu'en pays rennais, on n’observe pas la même variété des décors. Bien souvent, les formes varient peu, les mêmes poncifs sont souvent répétés et enfin, la qualité du travail, si elle est certainement plus égale, est aussi beaucoup plus stéréotypée. Une armoire rennaise, par contre, ne ressemble pas à une autre, sauf cas de deux pièces fabriquées par le même auteur et à seulement une année d'intervalle. Alors pourquoi cette singularité? Il y a sans doute conjonction de plusieurs causes. D'une part, nous le savons, en pays rennais, les ateliers étaient fort modestes et la plupart des artisans travaillaient seuls ou avec un unique apprenti, il y avait donc ainsi moins d'interactions entre les sculpteurs, et d'autre part bon nombre d'artisans n'étaient pas de véritables professionnels au sens strict du terme mais, comme l'a souligné Gwénaël Baron, exerçaient une double activité. Enfin, on doit bien entendu pouvoir mettre cette singularité en corrélation avec une autre : L'armoire rennaise est très souvent signée et datée et on ne connaît pas d'autre région où la signature soit à ce point répandue. Il semble donc bien y avoir aussi volonté de se singulariser, comme nous allons le voir avec les Croizé.

 

La dynastie des Croizé de Pacé

Il n'est que justice de commencer par évoquer les Croizé, véritable dynastie qui compte en effet au moins quatre générations de menuisiers, dont plusieurs sculpteurs de grand talent à la célébrité amplement justifiée. L'achat par le Musée de Bretagne d'une somptueuse armoire de 1824 signée Croizé aura été à l'origine des travaux de l'ancien conservateur du musée de Bretagne Jean-Yves Veillard. Travaux fort précieux qui ont permis de mieux connaître cette lignée de menuisiers, d'établir sa généalogie et de relever les lieux où ils s'installèrent.

Charles Croizé I
Le fondateur, le premier dont nous savons avec certitude qu'il était menuisier, est Charles Croizé.
Né en 1746 à Pacé, il épousa Angélique Allory en première noce et s'établit à l'Hermitage puis à Saint-Gilles jusqu'à sa mort en 1814.

Attachons-nous tout d'abord à reproduire les rares modèles connus signés Charles Croizé ainsi que les signatures.
A noter une signature
répertoriée dans "Les beaux meubles rustiques du Vieux Pays de Rennes" du Docteur Jambon : "FAIT PAR CHARLES CROIZE L'AN 1801 ou L'AN X de la REPUBLIQUE". Nous avons fait très récemment l'acquisition de cette armoire que nous considérons comme la plus exceptionnelle armoire de Charles Croizé.

 
armoire-rennaise-Croizé-1800

"FAIT PAR MOI CHARLES CROIZE
CE 12 JANVIER 1798"
Mobilier du Pays de Rennes-Musées de Rennes

"FAIT PAR MOI CHARLES CROIZE EN 1800"
SVV Rennes

"FAIT PAR MOI CHARLES CROIZE
CE 18 GERMINAL DE L'AN VIII"
Soit
le 8 avril 1800
Collection privée

 
"PAR CHARLES CROIZE L'AN 1801
OU L'AN DIX DE LA REP"

Ancienne Collection Antiquités Philippe Glédel

 

 
"FAIT PAR MOI CHARLES CROIZE
CE 3 AOUST 1802"

Le Mobilier Breton-Ch.Massin
"FAIT PAR MOI CHARLES CROIZE
CE 3 JANVIER L'AN 1803"

Ancienne Collection Antiquités Philippe Glédel

"FAIT P. C. C.ZE
EN L'AN 1805 CE 18 OCTOBRE "

Mobilier du Pays de Rennes-Cliché Musées de Rennes

 

Ces pièces sont toutes d'une très grande qualité, les bois superbes avec un emploi majeur du merisier utilisé en larges et épaisses sections, les assemblages parfaits. Le sculpteur fait preuve d'une très grande maîtrise technique, le tracé est sûr, partout souple et bien enlevé, la sculpture purement exceptionnelle, à la fois délicatement ciselée et parfaitement dégagée. Ce qui ne lasse pas d'étonner en considérant un panneau d'armoire de Charles Croizé, c'est qu'il nous paraît que le sculpteur vient de l'exécuter, alors même qu'il a plus de deux siècles. Son travail a le rendu d'une ciselure sur bronze. C'est pourquoi nous le considérons comme le sculpteur (de mobilier) breton le plus doué de sa génération.

Il est intéressant de suivre l'évolution stylistique à travers ces exemples connus de Charles Croizé, nous n'oublierons pas qu'il s'agit d'un mobilier de province présentant un important décalage avec le style en vogue dans la capitale.

L'armoire de 1798 est encore d'un style de transition entre forme Louis XIV et Louis XV, tandis que nous voyons bien que comparativement à l'armoire rennaise du milieu du XVIIIe (photographiée ci-dessus en illustration de la corniche à double cintre), les montants se sont arrondis, les pieds se sont galbés. Le décor "à la Bérain", encore maintenu dans le cadre rigoureux des trois panneaux droits, est déjà en partie naturaliste.
Sur les armoires de 1800 le style régence s'est affirmé, la coquille apparaît à l'amortissement des portes qui n'ont plus que deux panneaux tandis que l'on remarque l'apparition d'un superbe fronton de corniche ajouré.

Avec l'armoire du 8 avril 1800, dont les traverses adoptent un mouvement chantourné, nous glissons même vers le Louis XV. Elle est la plus richement sculptée, mais conserve toutefois une certaine raideur.
Assez curieusement le modèle de 1802, avec ses panneaux droits, effectue un retour en arrière.
L'armoire de 1803 quand à elle présente une différence sensible, le style Louis XV est là, les panneaux adoptent maintenant une forme quadrilobée pleine de souplesse. On note que le décor des panneaux est une reprise du dessin du modèle de 1802, mais adapté à la nouvelle forme
maintenant aboutie qui laisse davantage de place au décor naturaliste et permet de l'aérer. A noter aussi la réapparition du cadre mouluré autour des portes... Il s'agit véritablement d'une exceptionnelle armoire rennaise.
L'armoire datée 1805 ressemble beaucoup à celle de 1803 mais, en y regardant de près, on constatera de nombreuses variantes dans le décor : Charles Croizé est un artiste inspiré qui ne se répète jamais. Enfin l'armoire de 1801 est indéniablement le chef-d'œuvre de Charles Croizé et la première apparition connue d'une galerie ajourée au fronton de la corniche.

 

Hormis une autre armoire connue, également datée 1805, ces sept armoires semblent bien être les seules portant la signature de Charles Croizé répertoriée à ce jour et il ne paraît pas davantage exister d'autres exemplaires non signés ressemblant à celles-ci et qui pourraient lui être attribuées, ce qui laisse à penser que Charles Croizé a probablement signé toute sa production et aussi, bien entendu, que quelques autres armoires demeurent encore à découvrir.

   

Deux autres armoires, datées 1806 et 1810, semblent marquer le travail d'une période de transition entre la première et la seconde génération Croizé, déjà engagée avec l'armoire de 1805. Elles ne portent plus la mention du prénom tandis que les dates "en 8" font leur apparition et il semble qu'une nouvelle signature s'ébauche : C. CZE - C.ZE - CR.ZE pour en arriver à CROIZE. Il faut noter qu'en 1805, Charles Croizé, deuxième du nom, atteint l'âge de 30 ans, ce qui représente à cette époque l'âge de pleine maturité de l'artisan (nous avons remarqué que beaucoup de sculpteurs ont produit leurs plus beaux chefs-d'oeuvre à cet âge). S'il nous semble bien reconnaître (tout au moins pour celle de 1810) une sculpture de la main de Charles Croizé I, ces deux modèles marquent la toute première apparition du décor à la coquille allongée, élément visible au centre de la traverse haute.


"FAIT LE 8 OCTOBRE 1806
PAR CROIZE"

Collection privée

A noter la signature d'un buffet deux corps de cette période reproduit plus bas : Fait le 8 Janvier 1806 P : C.ze

"FAITE LE 18 OCTOBRE 1810
PAR CR.ZE A PACE"

Collection privée

 

Charles Croizé II
Il n'est pas simple d'identifier les œuvres de la descendance de Charles Croizé car il a été le seul à avoir signé du nom et du prénom.
Ainsi l'armoire de 1824 du Musée de Bretagne est demeurée sans attribution. Nous savons cependant que deux enfants sont nés de l'union de Charles Croizé et d'Angélique Allory. Sur le cadet, Julien-Désiré, nous avons peu de renseignements et le fait qu'il fût aussi menuisier n'a pas encore été établi. Le fils aîné, Jean-Charles Croizé, nous est beaucoup mieux connu. Nous savons qu'il est né en 1775, qu'il s'est installé à Pacé et que ses quatre fils seront à leur tour menuisiers, mais citons plutôt Jean-Yves Veillard :

" En 1836, Jean-Charles Croizé est établi au bourg de Pacé; il est dans sa soixantième année. Trois de ces fils - du second au quatrième - travaillent avec lui; à cela, il faut ajouter un jeune ouvrier de seize ans; soit un atelier de cinq personnes. L'aîné de ces fils, Julien-Charles, est aussi implanté au bourg et emploie deux ouvriers. Cinq ans plus tard, la taille du premier atelier s'est légèrement modifiée. A la place du jeune ouvrier de seize ans, ce sont deux compagnons de vingt-cinq ans. A plus de soixante-cinq ans, Jean-Charles Croizé reste le patron et, en dehors de l'aîné, aucun des trois autres qui ont entre vingt-trois et trente ans, n'a cherché à s'établir à son compte. En 1846, (Jean-) Charles Croizé est toujours recensé comme menuisier (il a soixante douze ans) et a gardé avec lui son plus jeune fils. "

Tous ces éléments (longévité professionnelle - succession nombreuse - taille de l'atelier - formation de compagnons) semblent bien attester que Jean-Charles Croizé est un maître sculpteur important, et il pourrait bien être celui des Croizé qui a le plus contribué à la renommée de cette dynastie.

Nous avons relevé, sur un certain nombre de très belles armoires, toutes parées de motifs décoratifs récurrents, des signatures avec les mêmes singularités : en premier lieu les caractères du nom Croizé y sont souvent gravés de la même manière, comme on peut le voir sur ce cliché - les deux dernières lettres presque toujours plus petites. Mais ce n'est pas tout, il existe entre ces signatures une seconde similitude tout aussi troublante.
  signature-de-Charles-croizé  
 
Armoire-rennaise-Charles-Croize-1814
"FAIT DU 18 AOÛT 1813"
PAR CROIZE"

Collection Musée des Arts et Traditions Populaires-MuCEM
"FAIT DU 18 OCTOBRE 1813"
PAR CROIZE"

Collection Privée
"FAIT DU 18 AVRIL 1814"
PAR CROIZE"

Ancienne Collection Antiquités Philippe Glédel
 
Armoire-rennaise-Charles-Croize-1814
armoire-du-pays-de-Rennes
"FAIT DU 28 AOÛT 1814"
PAR CROIZE"

Collection privée
"FAIT DU 28 OCTOBRE 1814"
PAR CROIZE"

Ancienne Collection Antiquités Philippe Glédel
ARMOIRE CROIZE VERS 1820-25
SIGNATURE ET DATE EFFACEES

Ancienne Collection Antiquités Philippe Glédel
 
ARMOIRE CROIZE VERS 1820-25
SIGNATURE ET DATE EFFACEES

Ludlow Antiques Auctions Ltd
Cliché Gazette anglaise
"FAIT DU 28 MAI 1824"
ANNO DOMINE PAR CROIZE"

Exposée par les Musées de Rennes
Cliché Menuisiers et mobilier du pays de Rennes-Apogée
"FAIT DU 28 MAI 1825"
ANNO DOMINE PAR CROIZE"

Collection privée
Cliché Musées de Rennes
 

 

Armoire de gauche :
Le cartouche en partie centrale des traverses est un des éléments déterminant dans l'attribution. Celui de la traverse haute demeure le même mais on voit celui de la traverse basse évoluer chez J. C. Croizé au fil des années, et nous observons sur cette armoire un motif quasi semblable à celui du modèle de 1824, ce qui vient encore confirmer notre attribution (en dépit de la typographie différente évoquée ci-après).

Armoire de droite :
Modèle avec une rare signature, et dont l'auteur Pierre-Jean-Marie Croizé (né en 1743) ne peut être que le frère ainé de Charles Croizé (soit l'oncle de Jean-Charles Croizé). Il est visible que Pierre Croizé ne possède pas les dons de son cadet. Signalons également l'existence de deux autres armoires (reproduites ci-après) signées du même prénom, datées 1834 et 1851 (que nous attribuerons cette fois au second fils de Jean-Charles Croizé : Pierre-Jean Croizé, né en 1811).

"FAIT DU 28 MARS 1826"
PAR CROIZE"

Hôtel des ventes de Poitiers
Cliché catalogue de vente
"FAIT POUR J.B. COUDE ET T. DUNOTSON EPOUSE
L'AN 1810 PAR MOI PIERRE CROIZE"
S.V.de Rennes
Cliché catalogue de vente
 

En effet, outre la typographie de la signature on observe tout d'abord que les trois plus anciennes sont datées du 18, tandis que toutes les autres armoires sont datées du 28 du mois. Sachant que leur fabrication nécessite au moins un mois de travail et même bien davantage pour certaines d'entre elles, cette précision du jour, récurrente chez J.-C. Croizé, et l'on ne rencontre que très fortuitement chez ses collègues, n’est sûrement pas le fruit du hasard, surtout quand il s'agit exactement du même jour. Jean-Charles Croizé a t-il cherché à laisser un indice, une marque pour ces contemporains, voire même pour la postérité ?
On remarque que les armoires les plus anciennes sur lesquelles sont reproduites cette signature CROIZE sont datées à partir de de 1813-1814. Charles Croizé père étant décédé en 1814, 1813 pourrait raisonnablement correspondre à la période où le fils aîné prend véritablement la succession de l’atelier et l’on peut penser que les armoires datées du 18 puissent être les premières armoires fabriquées par Jean-Charles à son compte. A partir d'août 1814 elles seront donc toutes datées du 28.
On peut par ailleurs constater que la moins ancienne est datée de 1826. En tenant pour admis que ces armoires ont bien un seul et même auteur (notons toutefois que les deux splendides armoires de 1824 et 1825 posent encore question, car elles n'ont pas la même graphie à deux tailles du nom Croizé, mais en ayant bien toutefois comme on le voit la mention du 28 du mois) tout indique qu'il s'agit bien de Jean-Charles Croizé. Rappelons, par probité, l'existence d'un cousin du nom de Charles-Pierre Croizé, dont nous connaissons que la date de décès, en 1840. Mais ce dernier était menuisier à Rennes où la fabrication d'armoire double cintre n'a jamais été établie, et nous ne le mettrons pas en ballottage avec le propre fils de Charles Croizé, possédant sans doute de surcroît le plus grand atelier de Pacé, village réputé comme le centre principal de fabrication de ce mobilier, à tel point que pour paraphraser Gwénaël Baron, nous ne devrions pas dire le mobilier rennais mais le mobilier de Pacé. Demeure toutefois l'existence d'un jeune frère prénommé Julien (et l'existence d'une certaine renommée associée à cet autre prénom au sein de la famille Croizé) dont nous savons encore peu de choses hormis sa date de naissance, 1798, qui refute toute possibilité de le désigner comme l'auteur de ces armoires (excepté certes à partir de 1824... Mais utiliser les mêmes signes de reconnaissance que son frère -le fameux 28- et réaliser de tels chefs-d'oeuvre à seulement 26 ans ans nous semblent deux improbabilités suffisamment pertinentes pour l'écarter). D'ailleurs cette renommée pourrait fort bien être celle du propre fils aîné de Jean-Charles Croizé, également prénommé Julien, qui fut le seul fils à fonder son propre atelier avant 1840, mais qui, né seulement en 1809, ne peut absolument pas davantage être l'auteur de ces deux chefs-d'oeuvre de 1824 et 1825.

 

Ces armoires sont toutes superbes, dans un style Louis XV des plus pur et des plus gracieux, et bien entendu, s'agissant de meubles fabriqués à la demande (nous pouvons dire de commande puisqu'il s'agit chaque fois d'armoires de mariage) ornées en fonction de la richesse du commanditaire mais aussi certainement de la prospérité du moment. La somptueuse armoire de 1824, acquise par le Musée de Rennes, est sans doute la plus exceptionnelle armoire rennaise connue, et à ce titre elle peut figurer parmi les plus belles armoires régionales de France, osons-le dire au risque d'être taxé de chauvinisme. Rivalise de beauté avec elle une armoire de 1825, inventoriée par les Musées de Rennes.
Si nous nous attachons à mieux observer le travail de la sculpture, il apparaît que le répertoire ornemental, bien que très riche et varié, possède de nombreux points communs. Bornons-nous à en relever quelques-uns parmi les plus marquants :
- Les ressemblances entre les traverses hautes et en particulier le motif central.
Il s’agit d’une coquille allongée, inspirée du style Régence et tout à fait inédite à cette date mais que l’on retrouvera employée par des sculpteurs de la génération suivante (L.Boutin–J.Gérard…). Jean-Charles Croizé paraît bien en être l’inventeur et Joseph Gérard, pour ne citer que lui, fut d'abord apprenti chez les Croizé avant de se mettre à son compte dans le village du Rheu.
- A la différence de Charles Croizé, qui ornait l'amortissement de la porte d'une coquille, son fils sculpte un motif fait de larges fleurs disposées en couronne.
- Tous les dormants de ces armoires ont en commun la même coquille sculptée au sommet.
On remarque aussi le soin accordé au pied, qu'il soit dessiné en volutes ou plus tard en un gracieux sabot de biche reconnaissable entre tous. Tous ces éléments permettent d'attribuer à Jean-Charles Croizé la réalisation de la superbe armoire à la date et signature effacée de nos anciennes collections, tout comme les armoires de 1824 et 1825 que nous considérons comme parmi les plus exceptionnelles armoires rennaises jamais réalisées.
On y retrouve le somptueux fronton qui coiffe l'armoire de 1824, un modèle très particulier que nous appellerons à galerie, et dont nous pensions lui attribuer la paternité jusqu'à la découverte de la formidable armoire de 1801 réalisée par son père.
Cependant Jean-Charles Croizé, bien plus qu'un simple sculpteur, est lui aussi un inventeur, et qui aura d'ailleurs de nombreux disciples. C'est un peu le Pierre Hache du mobilier rennais. Pourquoi n’a t-il pas tout simplement signé de son nom et prénom en toutes lettres comme c'est l'usage en pays de Rennes? Nous pouvons émettre plusieurs hypothèses :

Il est plus que probable, au sein de ce milieu rural du début du XIXe siècle où l’usage est de donner le nom de baptême du père à l’aîné des enfants était tenace (quoi de mieux pour illustrer cette tradition séculaire que cette petite anecdote, qui ne date pourtant que des années 1930 : Fernand et Jeanne eurent trois enfants. Le premier, une fille, on l’appela Fernande, puis une autre fille que l’on appela Jeanne bien évidemment, mais le troisième enfant fût un garçon, à la grande joie de ce couple d’agriculteurs qui ne se démonta pas et décida de l’appeler Fernand), et où les gens de cette époque n’aimait pas voir les habitudes bousculées, que Jean-Charles, s’il ne s’appelait pas plutôt Charles-Jean (erreur possible sur l’acte de naissance ou du relevé de celui-ci), se faisait en tous cas certainement appeler Charles. On remarque d'ailleurs à ce propos que Gwénaël Baron et Jean-Yves Veillard écrivent "(Jean) Charles Croizé". De là sans doute, soit par respect pour son père ou par soucis de se distinguer ou encore les deux à la fois, l’idée d’adopter cette signature atypique.
Il est sans doute aussi un autre aspect qu’il faut envisager : à cette époque, les sculpteurs avaient une grande réputation. Voici ce que nous apprend le Dr Jambon :
" Quelques-uns de ces artisans jouissaient d’un prestige énorme dans leur région. Au début, on prêtait à leur talent une origine surnaturelle, voire même diabolique. Bien mieux, comme les rebouteurs d’aujourd’hui *, ils jouissaient d’un
« don » qu’ils pouvaient transmettre à leur descendants "
* Nous devons nous replacer dans le contexte des années 1930.
Le Dr Jambon poursuivait son récit en rapportant l'histoire d’un sculpteur célèbre du nom de Maladri qui "portait dans sa poche une tabatière remplie de « petits diables » qui, lorsqu’il les faisait travailler, exécutaient de véritables chefs-d’œuvre avec une rapidité incroyable" ... "nous avons eu la bonne fortune de voir une gaine d’horloge qui portait l’inscription suivante : P. MALADRI DE NUIT DU 13 O 14 AOUT 1810. C’était loin d’être un pur chef-d’œuvre".

Jean-Charles Croizé, ou Charles Croizé II, comme nous pourrions le nommer, n'aurait-il pas tout simplement signé ainsi par jeu, pour le simple plaisir de l'énigme.

Et puisqu'il est question d'énigme, il en est justement une posée par la signature d'un magnifique lit carrosse photographié dans le livre du Dr Jambon et qui déconcerte visiblement Gwénaël Baron et Alison Clarke qui le reproduisent dans leur ouvrage. Nous avons vite été convaincu qu'il s'agissait d'un cryptogramme.

 

Ce lit est gravé d'une suite de lettres et de chiffres :
c 9 4 3 z 2
1831
Les auteurs émettent une hypothèse: doit-on y voir un accident typographique ? et s'interrogent : " doit-on lire Croizé ? "


En effet, ce lit a bien la qualité des plus beaux meubles fabriqués à Pacé et le registre ornemental de sa sculpture est au plus près du travail des Croizé, sans compter que ce nom paraît être le seul possible dans la liste des sculpteurs connus.
Enfin, il provient de l'ancien manoir du Grand-Champeaux, situé tout près de Pacé, et dont nous savons (pour être intervenu dans la succession familiale) qu'il était meublé d'armoires signées par les Croizé.

Et il existe une autre hypothèse : Ne s'agirait-il pas d'un rébus ? Il y a trois voyelles dans le nom Croizé : O I et E,
qui sont respectivement la 4èm, 3èm et 2èm voyelle.
Reste le chiffre 9, placé là pour que le rébus ne soit pas trop facile.
Le R est la 9èm lettre de l'alphabet inversé.

La réponse est donc :
c r o i z é
1831

Lit carrosse rennais
Attribué à Charles CROIZE (fils)
Menuisiers et mobilier du pays de Rennes-Apogée

 

Réminiscence des rébus celtiques ou plutôt connaissances ésotériques acquises par le compagnonnage? Jean-Charles Croizé qui se plaisait ainsi à brouiller les pistes était il "un initié", à t'il fait son tour de France? C'est en effet plus que probable. Par curiosité, nous nous sommes renseigné sur le sens symbolique du nombre 28, et voici ce que nous avons pu lire : "Au point de vue mystique, ce nombre montre l'Initié".

L'histoire de Maladri ouvre la voie à une conjecture supplémentaire. Cet homme là n’était-il pas dans le fond un habile marchand qui passait occasionnellement commande à des sculpteurs de talent ? Aujourd'hui encore*, c'est une pratique fort répandue chez les sculpteurs qui ne peuvent fournir à leur carnet de commandes et s'adressent à leurs collègues. Et ainsi au XVIIIe siècle dans la capitale, les marchands merciers étaient quelquefois des ébénistes qui achetaient à leurs confrères. C'est d'ailleurs l'une des causes de l'existence de très beaux meubles qui ne portent pas d'estampille ou bien une estampille habilement dissimulée, quitte à la frapper sur le dessus d'une ceinture recouverte d'un plateau, comme sur un bureau plat par exemple. Ainsi le bureau plat dit "de Vergennes" du Musée du Louvre qui posa aux experts l'énigme d'une double estampille. On y trouve en effet celle de Pierre II Migeon, placée en évidence et, cette fois savamment cachée, celle d'un des plus grands maître-ébéniste de l'époque, Jacques Dubois. Pierre Kjellberg dans "Le mobilier français du XVIIIe siècle" nous rapporte cela comme : "une pratique assez fréquente chez les marchands qui cherchaient à s'approprier la paternité des ouvrages qu'ils vendaient".
Nous pourrions imaginer, mais c'est là bien entendu pure spéculation, que le lit du Grand-Champeaux aurait été commandé à Jean-Charles Croizé en 1831 par le fameux Maladri. Ceci pourrait expliquer, outre la signature déguisée de Charles Croizé (II), la grande renommée de Maladri, la déconvenue du Dr Jambon devant une pièce portant la signature de Maladri ainsi que... Les petits diables ou autres farfadets!

* Reprenons le clavier ici pour relativiser ce point car, en quelques années seulement, les sculpteurs de nos villes et campagnes ont vu leur commandes baisser de manière exponentielle, au point que ce beau métier pourrait disparaître, et ce du fait que les mêmes qui reprochaient aux brocanteurs d'avoir échangé le mobilier de leurs aïeux contre du mobilier de formica (la mode... Déjà, à l'époque, n'est ce pas...) vont aujourd'hui (de leur plein gré... Mais oui puisque c'est la mode!) acheter des "meubles" dans une enseigne suédoise (pour ne pas la nommer) ... Des "meubles" donc, faits d'une matière qui élèverait (si la chose était possible) le formica au rang de matériaux noble et ajoutons même de matériaux salubre... Pour que tout soit dit en un mot puisque le Larousse nous vient en aide avec une parfaite définition : "Salubre - Qui est favorable à la santé, à l'organisme : Climat salubre / Qui favorise l'harmonie, le bien-être social, le redressement économique : Mesure salubre pour le pays"... Voilà qui devait être dit en passant.

 

Charles Croizé III et les meubles des ateliers Croizé

Armoire-rennaise-Croizé-1831 Armoire-rennaise-Charles-Croize-1834

"FAIT EN 1831 PAR CROIZE"
Ancienne Collection Antiquités Philippe Glédel

"FAIT PAR CROIZE 1834"
Ancienne Collection Antiquités Philippe Glédel

"FAIT PAR CROIZE EN 1834"
Collection privée

 

"FAITE DE 1836 PAR CROIZE"
Collection Antiquités Philippe Glédel

"FAIT PAR CROIZE EN 1838"
SVV Rennes

"1838 PAR C:LE CROIZE"
Collection privée

 
Armoire Croize 1848

"FAITE A PACE EN 1842 PAR CROIZE"
SVV Rennes

 

"FAITE A PACE L'AN 1847 PAR CROIZE"Mobilier du Pays de Rennes-Cliché Musées de Rennes

"FAIT PAR CROIZE EN 1848"
Collection Antiquités Philippe Glédel

 
Armoire-rennaise-signee-Croize-1856

"FAIT POUR ANNE MARIE HARDY
EN 1856 P:CROIZE"

Ancienne Collection Antiquités Philippe Glédel

"FAIT L'AN 1834 PAR PIERRE CROIZE"
Collection privée

PAR PIERRE CROIZE 1851
Vie à la campagne/Ed. Hachette

 

Voici pour clore ce chapître les armoires de la troisième génération Croizé, fabriquées dans un atelier devenu le plus réputé et le plus important du Pays de Rennes, et qui comptera jusqu'à six artisans travaillant ensemble. Charles Croizé II veillera en patriarche à la transmission du savoir faire et de la belle oeuvre et, hormis ses propres fils (Julien, Pierre, Charles et Jean-Marie), il y formera des apprentis menuisiers-sculpteurs qui compteront parmi les plus habiles. Malgré tout, là encore, cette série d'armoires a plus qu'un air de famille et le connaisseur distinguera une armoire des Croizé avant même d'y lire la signature car outre la qualité de menuiserie qui les font se démarquer de beaucoup d'autres, les ornements de ces armoires ont de nombreux traits de ressemblance, les plus immédiatement repérables étant le motif en forme de cœur animant le centre de la traverse basse et les colonnes ioniques aux moulures des portes. A noter une armoire de 1851 très richement sculptées signée de Pierre Croizé, une armoire de 1838 (au centre) nous paraît avoir été sculptée par Charles Croizé II et une signature se distingue des autres (toutes simplement marquées "CROIZE"), on peut en effet y lire "C:LE CROIZE", soit très probablement la signature de Charles Croizé III, né en 1813, travaillant encore à Pacé en 1838 et qui s'établira à Bruz trois ans plus tard, bientôt secondé de ses deux fils, qui seront les derniers à perpétuer le nom de Croizé par une quatrième génération... Perpétuer est sans doute beaucoup dire, car nous arrivons définitivement à l'ère de la copie et surtout du pastiche, le mobilier rennais n'y échappera pas. Plus tard encore, le paysan n'ayant plus d'yeux que pour le tout nouveau tracteur américain qui le conduira inéluctablement à se meubler en formica, ce sera l'ère du mobilier standardisé (et donc sans intérêt) industriel (et donc en tous points navrant) ... et de même pour l'agriculture d'ailleurs ... ô combien industrielle (... et plus que navrante **).

** C'est triste à dire, et c'est un peu déborder du sujet, qu'aujourd'hui il y a pire qu'Al Quaïda...Vous me direz : Daech?... Oui fort bien et sans doute, mais alors... Que faites-vous de Monsanto?***

*** Reprenons le clavier, à des fins de mise à jour, puisque Monsanto a été racheté par le groupe Bayer... Le gaz moutarde du Vietnam rachetant le gaz des camps de la mort nazis. Je ne sais pas si c'est une bonne nouvelle, mais certainement la boucle est bouclée!

 

Les buffets Croizé


Mais pour vite regagner le plaisir et l'émotion positive que nous procure ce mobilier des temps anciens, voici le buffet à deux corps, meuble éminemment représentatif et véritable graal du collectionneur du mobilier rennais (surtout quand y est apposée une telle signature). Les Croizé nous en ont laissé quelques très rares exemplaires. En voici trois ci-dessous, et ce sont d'ailleurs les seuls qui nous sont connus (à signaler deux autres modèles, mais dont les signatures sont apogryphes).

 

Buffet-rennais-Charles6croizé-signé-daté

"FAIT PAR MOI CHARLES CROIZE CE 19 AOUT 1785"
Collection privée

 

 

 

Le premier l'est en effet de beaucoup car figurant dans de

nombreux ouvrages, bien des amateurs le considérant

comme le plus merveilleux buffet rennais.

Il est l'oeuvre de Charles Croizé et daté de 1785.

Ses trois particularités immédiatement repérables sont les

superbes coquilles ajourées qui ornent les traverses hautes

des portes du corps supérieur, la présence d'incrustations de

bois de placage découpé et enfin le galbe des tiroirs ainsi

que des traverses (la traverse médiane ayant la particularité

d'être galbée en plan, mais également en élévation pour

rattraper le niveau des portes qui sont planes).

 

Non daté et non signé, fin XVIIIe
Ancienne Collection Antiquités Philippe Glédel

 

 

A noter ce buffet non signé copiant le fameux buffet de

1785. Il s'agit d'une copie d'époque, qui pourrait avoir été

réalisé dans l'atelier des croizé par un apprenti, mais plus

probablement par un autre artisan recevant une commande

d'un particulier qui, ayant eu connaissance du buffet Croizé,

désirait en faire faire un exemplaire semblable (à moindre

coût). Mais une copie n'a rien à voir avec une oeuvre

originale, elle cherche à rivaliser en singeant (ici on voit

même que le copiste a ajouté de la sculpture là ou l'artiste-

sculpteur Charles Croizé avait laissé des zones de vide

médian où se repose le regard) et en dépit de la bonne

volonté de l'artisan, il manque ici la créativité, le souffle, la

force, la qualité d'exécution qui va de pair (si la différence

de qualité de sculpture manque de visiblité sur les clichés,

le tracé des moulures mis en comparaison est à lui seul

assez éloquent).

 

Buffet-rennais-Charles-Croizé

"FAIT PAR MOI CHARLES CROIZE"
Collection privée

 

 

Un second buffet, cette fois non daté mais également signé

de Charles Croizé, à été découvert récemment, il est la

fierté d'un grand collectionneur du mobilier rennais. Est-il

antérieur en âge ou postérieur au premier? Difficile de le

dire, mais très certainement fabriqué dans la même

décennie, il présente une construction et un décor presque

identiques, avec cependant l'ajout aussi atypique que hardi

d'une sculpture ajourée de la traverse médiane. A noter

toutefois que les façades de tiroirs, très probablement

marquetées à l'origine, ont hélas été refaites et ornées de

sculptures. Ce spécimen qui a perdu ses étagères à

bobèches a cependant conservé son grillage d'époque

entièrement fabriqué à la main.

 

Buffet-Charles-Croizé-daté-1806

"FAIT LE 8 JANVIER 1806 P : Cze"
Ancienne Collection Antiquités Philippe Glédel

 

Le troisième exemplaire, que nous avons eu le plaisir de découvrir,

est signé Croizé et daté 1806 (nous avons d'ailleurs dû reprendre le

tracé de la date qui avait été antidaté 1706... Comme quoi tous les

antiquaires ne "vieillissent" pas leurs meubles, puisqu'il en est ainsi

qui les "rajeunissent").

Sa signature : Fait le 8 Janvier 1806 P : C.ze

nous ramène à la période que nous avons qualifiée de transition de

l'atelier, entre Croizé père et fils. Nous le donnons pour un travail de

Charles Croizé II, qui s'inspire visiblement des modèles de son père

(que nous savons en outre encore bien présent à ses côtés) et qui

tente même ici de les sublimer : même coquille ajourée, mêmes

galbes du corps inférieur mais ajout d'un profil en arbalète (à notre

connaissance parfaitement inédit dans le mobilier rennais) et d'un

fronton de corniche ajouré dans l'esprit des deux armoires de

Charles Croizé datées de 1800. Tout comme le second, il a perdu

ses étagères en vaisselier (pour cause de commodité) et, tout

comme le premier, a été vitré.

 

 

Le Docteur Jambon écrivait à propos des buffets rennais : "Il est fort probable même que, pendant très longtemps, il fut spécialement réservé aux familles les plus aisées. Quoiqu'il en soit, les spécimens que nous connaissons sont presque toujours très beaux." Ces exemplaires commandés aux Croizé coûtèrent sans nul doute fort cher à l'époque, et sans doute aussi ces meubles constituaient de véritables "morceaux de bravoure" pour les Croizé qui les fabriquaient pour leurs plus riches clients. Pour mieux juger de la qualité du travail, voici ci-dessous un détail de chacun d'entre eux.

 

 

 

 

Jehan et Jacques Tulou de La-Chapelle-des-Fougeretz


Dans la région rennaise, le nom de Tulou (indifféremment orthographié Tulou ou Tullou) est associé à une famille de sculpteurs qui jouit d’une très grande réputation. En effet, au côté de celui des Croizé et Allory, le nom Tulou figure parmi les trois plus célèbres. Ainsi, dans son livre paru en 1927 et consacré au meubles du pays de Rennes, le docteur Jambon les place particulièrement en exergue. Citons trois passages de l’ouvrage :

Le mobilier du pays de Rennes

Mais alors que l’on en connaît les raisons pour ce qui concerne les premiers (on considère que les plus beaux meubles rennais fabriqués sont ceux des Croizé sur quatre générations et les Allory sont bien connus pour ceux de Charles Allory qui a marqué les esprits en signant presque toutes ses œuvres) l’origine d’une telle renommée se rattachant aux Tulou peut apparaître plus étonnante puisqu’on ne connaît que très peu d’ouvrages signés de leurs mains. On doit certainement et tout d’abord voir des causes de cette réputation de par la généalogie familiale justement prise en exemple par le Docteur Jambon :

Généalogie d'une famille de menuisiers-sculpteurs du Pays de Rennes

Cette transmission du métier de menuisier-sculpteur sur six générations fait des Tulou la plus longue dynastie connue. Elle commence avec l’apparition des premiers meubles du style rennais vraiment abouti, ainsi l’armoire signée Jehan Tulou et datée 1759 conservée par les Musées de Rennes qui prend place parmi les plus anciennes connues, et la génération Tulou est encore présente à la fin de la fabrication. Et sans doute aussi, la personnalité de Raphaël Tulou, qui fut l’un des derniers sculpteurs du mobilier du pays de Rennes, n’est pas sans incidence sur la renommée familiale encore bien vivante.

Tulou Raphaël Baptiste Joseph, dit Raffig Tullou (1909-1990) : Artiste rattaché au fameux groupe "Ar Seiz Breur" (Les sept frères), en tant que décorateur il a collaboré avec l'architecte malouine Yves Hémar, sculpteur tant sur bois (meubles celto-bretons) que sur pierre (auteur de la statue de Nominoë à Bains sur Oust), personnage fantasque enfin, féru d’ésotérisme et de légendes celtiques, et qui se faisant appeler sous le nom druidique (druide, il l'était en effet) de Nven Lewarc’h (Lewarc’h le jeune).

Si près de huit artisans répondant au nom de Tulou ont été recensés, l’étrangeté vient du fait que paradoxalement bien peu de leurs œuvres l’ont été. Ils ont pourtant dû produire un certain nombre d'armoires mais il est vrai que beaucoup, parmi les premières armoires fabriquées, ont disparues, et l'on peut supposer que certains de la jeune génération ne signaient pas tout, car il faut rappeler qu’il existe de nombreuses armoires rennaises non signées, y compris parmi les plus richement sculptées. Ainsi en est-il d'une armoire de l’ancienne collection Jouanolle, modèle datant en effet du milieu du XVIIIe siècle, et que l’on peut attribuer à Jacques Tulou lui même, mais plus précisément sans doute vers 1760 :

Nous pouvons voir dans les armoires de 1777 et 1780 , tout comme dans celle de 1772 de la collection Jouanolle (notre prédécesseur, ancien grand spécialiste du mobilier rennais), tant par la qualité du décor que par l’exécution de celui-ci, les véritables justifications de la renommée des Tulou. Le dessin est superbe, la sculpture parfaitement dégagée, et assurément Jacques Tulou est de ceux qui ont mené, avec Charles Croizé et quelques autres, le mobilier rennais à son apogée.

Voici un détail de notre armoire de 1777 permettant de mieux juger de la qualité de sculpture, purement exceptionnelle. Le style ornemental de Jacques Tulou est au plus proche de celui de Julien Dondel (La-Chapelle-des-Fougeretz n'est elle pas également au plus proche de Saint-Sulpice-la-Forêt, et même plus encore de Betton où Dondel pourrait avoir eu un temps un atelier, tel que signalé par le Dr Jambon), mais il cède moins à la nouveauté de la Régence, et sa sculpture perd en souplesse ce qu'elle gagne en rigueur de ciselure. Ainsi si la virtuosité de Julien Dondel rejoint celle de Jean-Charles Croizé, celle de Jacques Tulou nous paraît égaler celle de Charles Croizé.

Nous savons que le style rennais est issu de la venue de sculpteurs ornemanistes parisiens et de l’interprétation locale des ornements "à la Bérain". Comme le suggérait déjà le Docteur Jambon, de nombreux artisans de la capitale sont venus travailler à Rennes à partir de la fin du XVIIe siècle et ont notamment contribué à la décoration du Parlement de Bretagne. Ils ont formé localement des apprentis mais il fort possible que certains de ces maîtres-sculpteurs soient demeurés à Rennes. Devons-nous y voir l’origine des Croizé et des Tulou (noms répertoriés justement, en dehors du pays de Rennes, uniquement à Paris) et dont les dons de sculpteurs n’en finissent pas de nous étonner? C’est une hypothèse qui peut sérieusement être avancée...

Nous avons pu voir ou avoir quelques très rares exemplaires de Jehan et Jacques Tulou, dont deux signés Jehan. Signalons cependant, pour le second, que la date au troisième chiffre illisible demeure mystérieuse. On a cru y lire 1727, mais nous voyons cette armoire de fabrication postérieure à celle du musée de Bretagne (fabriquée alors que le sculpteur n'a encore que 24 ans - Et s'il existe bien une armoire datée 3 ans plus tôt, le Dr Jambon précise bien : "Louis XIII", modèle qui est toujours sommé d'une corniche droite et adopte une large traverse basse façon coffre (ces deux détails étant caractéristiques des plus anciennes armoires rennaises).

 

Les armoires signées J. Tulou

Musée de Bretagne
Armoire signée Jehan Tulou datée 1759

S. V. Blois
Armoire signée Jehan Tulou datée 17[6?]7

Ancienne collection Antiquités Jouanolle
Armoire signée Jacques Tulou datée 1772

 

Ancienne Collection Antiquités Philippe Glédel
Armoire signée Jacques Tulou datée 1777

S. V. Argent-sur-Sauldre
Armoire signée Jacques Tulou datée 1778

Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel
Armoire signée Jacques Tulou datée 1780

 
 

Julien Dondel de Saint-Sulpice-la-Forêt


Julien Dondel est un artisan qui figure parmi les plus célèbres du pays de Rennes. Bien qu'il soit cité dans les principaux ouvrages référents, que trois armoires (non signées) de sa main figurent dans les collections des musées de Rennes, on sait encore peu de choses sur lui, hormis que son atelier se trouvait à Saint-Sulpice-la-Forêt, commune située au nord de la capitale bretonne.

Ainsi il exerçait à l'une des extrémités du "croissant fertile" du pays de Rennes, et donc relativement loin de l'épicentre, situé au nord-ouest de Rennes, soit la commune de Pacé et ses environs immédiats où nombre de menuisiers-sculpteurs s'activaient. Peut-être faut il y voir l'une des principales raisons de l'originalité qui caractérise son travail, peut-être aussi sa proximité avec les Tulou.
Car en effet Julien Dondel, à l'instar toutefois de Jacques Tulou, sculpteur de grand renom qui était sans doute son plus proche voisin (puisque de La-Chapelle-des-Fougeretz à Saint-Sulpice-la-Forêt ou mieux encore à Betton -où selon le Dr Jambon il aurait eu un atelier- il n'y a pas loin...Et Julien Dondel ayant tissé des liens avec les Tulou, voilà qui serait tout à fait plausible, eu égard aux nombreuses similarités) à été l'un des seuls (et le plus hardi dans cette liberté) à s'être affranchi en plein XVIIIe siècle (exception faite pour un buffet daté 1779) des cadres moulurés en quadrilobes, et à négliger les parties laissées en réserves non sculptées pour mieux couvrir (tout en évitant avec talent le piège de la surcharge) toute la surface des panneaux de ses armoires. On remarque également qu'alors que ses concurrents restent encore attachés à une parfaite symétrie, Dondel adopte déjà l'asymétrie dans ses décors. Le caractère délié de sa sculpture, en asymétrie et sans contraintes des cadres, est en parfaite adéquation avec les canons du style Régence.
C'est pourquoi nous voyons en lui un artisan novateur, et d'autant que pareillement, la seule et unique armoire du XIXe siècle connue de sa main, signée et datée 1807, en est le témoignage. Cette dernière (que nous reproduisons ci-après) est en effet de pur style Louis XV, et constitue la plus ancienne de ce type que nous ayons vue, environ sept ou huit années avant son adoption dans le pays de Rennes (rappelons qu'alors en Cornouailles par exemple, c'est toujours le style Louis XIII qui perdure).

La renommée d'un atelier florissant d'où sont sortis de nombreux meubles, ajoutée à cette spécificité de décor qui rend son travail reconnaissable entre tous, nous ont permis de compiler un nombre d'armoires (que nous reproduisons ci-dessous) assez considérable et, avec son confrère Charles Allory de Pacé, il nous apparaît comme l'un des deux artisans les plus prolifiques. Il convient de garder à l'esprit que, contrairement à ce même Allory, la plupart des sculpteurs du pays rennais ne signaient qu'une partie de leurs ouvrages et que les ateliers des plus célèbres d'entre eux disposaient de plusieurs compagnons, généralement affectés aux tâches de menuiserie, même si les plus chevronnés prenaient part à la sculpture. Ainsi la plupart des éditions traitant du sujet présentent (sans le savoir, pour la plupart des exemplaires qui ne sont pas signés) au moins une armoire de Julien Dondel. On notera enfin que si toutes ces armoires présentent de nombreux traits communs, aucune n'est exactement semblable (hormis les modèles 4 et 5 - Mais justement, nous avons pu par la suite vérifier qu'il s'agissait bel et bien de la même armoire, dont le fronton et les entrées de serrure avaient disparus et furent par la suite remplacés).

Observons tout d'abord ces deux chefs-d’œuvre parmi les buffets rennais, meubles alors réservés aux plus riches propriétaires terriens de la région et pour ce qui concerne ces véritables modèles rennais, soit à corniche à double cintre (le buffet de 1779 fait cependant encore une fois exception), quasi exclusivement commandés aux sculpteurs de grande renommée. Le troisième buffet n'est pas signé mais nous lui attribuons ce travail.

 

Les buffets J. Dondel


---------------------------Gazette Drouot------------------------------Photo d'archives (Meuble reproduit dans de nombreux ouvrages)
Signature "au papier" encré sous verre dans un médaillon----------Double signature : une gravée et une encrée à l'intérieur
Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel
-------------------Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel


Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel



Les armoires signées ou attribuées à J. Dondel

Ancienne Collection Antiquités Philippe Glédel
Armoire non signée

Mobilier du Pays de Rennes/Musée de R. Armoire non signée

Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel
Armoire signée (au papier) et datée 1771

 

Le mobilier breton / Balnéat
Armoire non signée

Le mobilier breton / Trotel - Coll. Ecomusée
Armoire non signée

Les meubles du pays de Rennes / Dr Jambon
Armoire non signée

(Ci-dessus) Très certainement les deux mêmes armoires photographiées à différentes époques, ce que confirme le fronton refait de l'armoire du centre.

Collection privée
Armoire non signée

Collection musée de Rennes
Armoire non signée

Collection privée
Armoire non signée

 

Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel
Armoire non signée

Ancienne collection Pierre Bellemare
Armoire signée et datée 1775

Guidargus du meuble régional
Armoire non signée

 

Meubles Régionaux / A. Maumenée
Armoire non signée

Vie à la campagne / Hachette
Armoire non signée

Vente Hôtel Drouot / Etude Ader
Armoire non signée

 

Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel
Armoire signée (au papier) et datée 1785

Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel
Armoire non signée

Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel
Armoire signée et datée 1791

 

Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel
Armoire non signée

Collection privée
Armoire non signée

Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel
Armoire non signée

 

Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel
Armoire signée J. Dondel

Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel
Buffet-vaisselier non signé

Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel
Armoire L. XV signée J. Dondel datée 1807

 
 

Jean-Baptiste Depouez

 

Jean Baptiste Depouez figure parmi les meilleurs artisans rennais de la fin du XVIIIe.

On connait un certain nombre de meubles signés de sa main :

- Un buffet, daté 1788, d'une grande richesse de sculpture, avec tiroirs galbés à incrustations, de notre collection personnelle.

- Un buffet, daté 1789, très richement sculpté, avec des moulures noircies (à la mort de Louis XVI) et tiroirs galbés, que nous proposerons prochainement à la vente.

- Un autre splendide buffet daté 1798, de nos anciennes collections (puis collection Catteliot), est venu enrichir les collections du Musée de Rennes, dont il est l'un des fleurons.

Les buffets J. B. Depouez

Buffet 1788
Collection personnelle

Collection Antiquités Philippe Glédel

Buffet 1789
Actuelle collection

Collection Antiquités Philippe Glédel

Buffet 1798
Collection Ecomusée du pays de Rennes

Ancienne Collection Antiquités Philippe Glédel

 

Le buffet de 1798 est référencé dans l'ouvrage
Menuisiers et mobilier du pays de Rennes aux 18e et 19e siècles de Gwénaël Baron
tout comme y est référencée l'armoire de 1784, ainsi qu'une autre armoire datée 1798.

 

Les armoires J. B. Depouez

Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel
Armoire signée datée 1784

Ancienne collection Antiquités Philippe Glédel
Armoire signée datée 1789

Anc. collection French Accents Antiques - USA
Armoire signée datée 1791

 

Ancienne Collection Antiquités Philippe Glédel
Armoire signée datée 1796

Collection Privée
Armoire signée datée 1796

Anc. collection Marc Scheer - Luxembourg
Armoire signée datée 1799

 

Hormis sur l'armoire de 1799, on retrouve, sur tous les meubles portant la signature Depouez, le même panneau à décor de couronne fleurie, liens d'amour et lambrequins. Il faut noter que trois autres artisans, Charles Croizé I, François Allory I, Louis Hindré, ont utilisé un motif quasiment semblable.
Depouez a souvent repris les mêmes décors à la Bérain sur ses armoires, d'une sculpture très luxuriante, un tout petit peu heurtée cependant et d'une qualité inégale. Ainsi la sculpture de l'armoire de 1789, la plus exceptionnelle Depouez que nous ayons vue, est d'un autre niveau que celle, juste en dessous, de 1796 (variations qui peuvent être dues à l'âge du sculpteur ou au fait d'avoir peut-être parfois laissé la main à un compagnon, et comparant cette dernière armoire avec notre modèle daté de cette même année 1796, nous opterons pour la seconde hypothèse).

Cette maie rennaise du Musée de Rennes
pourrait fort bien être attribuée à Jean Baptiste Depouez.

 

C'est principalement le cul-de-lampe en cartel à fleuron, chaque fois répété au centre des traverses basses qui retiendra l'attention, car ce motif bien particulier peut être considéré comme "la griffe" de Jean-Baptiste Depouez.

 

 
 
 
 

ANTIQUITÉS PHILIPPE GLÉDEL – TOUS DROITS RÉSERVÉS. 1998/2023