COMMODE SCRIBANNE BORDELAISE EN ACAJOU MOUCHETÉ |
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Exceptionnelle commode-bureau dite "scriban" en acajou de Cuba moucheté massif galbé toutes faces ouvrant à un abattant et quatre tiroirs sur trois rangs. Travail bordelais de la fin de l'époque Louis XV.
Au contraire de la table en cabaret, ce n'est pas de l'influence parisienne que naquit la mode des commodes scribannes dans les grands ports français mais bien plutôt des relations que ceux-ci entretenaient avec les Pays du Nord. Il faut en effet voir son origine dans le cabinet hollandais ou "schrifcabinet" dont le corps inférieur est fortement bombé. Ceci est encore plus vrai à Bordeaux, ville qui entretenait des rapports commerciaux avec la Hollande. Ainsi au XVIIIe siècle, ce meuble que nous nommons aujourd'hui "scriban" était désigné sous le terme de "bureau-cabinet". Ce n'est sans doute pas un simple hasard car en effet il semble avoir les mêmes fonctions que les anciens cabinets d'ébène de l'époque Louis XIV, tout à la fois meuble destiné à renfermer des objets précieux et secrets et meuble à fort esprit de représentation. A Bordeaux, plus encore que la fameuse commode en tombeau, la commode scribanne est le meuble de l'armateur ou négociant bordelais fortuné, parfaite expression du faste de ces sociétés marchandes au XVIIIe. Nous avons ici affaire à une très rare commode scribanne, de grande qualité, que ce soit par la qualité des bois et des assemblages, l'amplitude et la fluidité des galbes et surtout la richesse de sa sculpture à l'expression néo-classique bien affirmée en parfaite harmonie avec ses bronzes. En ce qui concerne les meubles de port, bien souvent les garnitures de bronze furent commandées à Paris, au moment de la fabrication par l'ébéniste lui même (relativement souvent pour les plus beaux meubles) ou quelquefois plus tard (pour les modèles moins riches ou de menuisier), ce qui explique que l'on voit souvent des bronzes rapportés. Il faut souligner qu'il est bien rare d'être en présence d'un meuble de fabrication provinciale n'accusant pas de retard par rapport à la capitale comme c'est le cas ici, et ce d'autant que le répertoire décoratif Louis XV à longtemps persisté en province, sous le règne de Louis XVI et même bien au delà. Aussi notre ébéniste se montre particulièrement novateur, choisissant les bronzes à la dernière mode de la capitale dans les années 1760, un modèle dit de Transition, et l'orne d'une sculpture aussi charmante que virtuose empruntant à la mode nouvelle, visiblement inspirée des premiers modèles du peintre ornemaniste Jean-Charles Delafosse qui préfigurent les changements à venir et le retour au classicisme. Ce scriban s'inscrit parfaitement dans la période dite "parisienne" du mobilier bordelais : alors qu'au XVIIIe ce port marchand est en pleine prospérité, les meilleurs ébénistes, dont certains venus de Provence, ont voulu y égaler les modèles parisiens, en parant de très beaux acajous (cette période marque justement la vogue du moucheté) de somptueuses sculptures (parfois en fac-similé des bronzes parisiens). Si son opulence et la construction de son bâti témoignent à bien des égards du savoir faire de l'ébéniste, sa sculpture d'une grande richesse et d'une qualité éblouissante, courant sur les traverses basses ainsi que les quatre pieds témoigne pour sa part de son savoir faire de sculpteur. Ce modèle, sans doute unique, prend les allures d'apparat d'une fabrication de commande pour un riche armateur.
Les critères de qualité d'un scriban bordelais. - Qualité des bois employés : l'acajou de Cuba moucheté étant "le must". - Amplitude des galbes : galbes à la fois prononcés, tant en plan qu'en élévation, tant en façade qu'en côté. - Abattant à bords galbés : observé sur les plus beaux modèles, il est à Bordeaux un signe incontestable de qualité. - Intérieur galbé : les plus beaux scribans ont bien entendu les intérieurs les plus riches, avec de nombreux tiroirs galbés, une porte de tabernacle qui l'est également. - Traverses sculptées : assurément le luxe suprême des meubles bordelais. - Côtés moulurés : généralement observé sur les plus riches scribans. - La garniture de bronze : commandée à Paris pour les modèles les plus soignés.
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Dimensions : 111 cm de haut x 127 cm de large x 64 cm de profondeur.
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Style Transition - fin de l'époque Louis XV Bordeaux vers 1760-1775
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Le meuble ouvert |
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Façade et côtés en acajou de Cuba moucheté |
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Chantournement du bord de l'abattant - côtés moulurés avec traverses intermédiaires - traverses basses galbées en élévation |
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4 pieds à volutes enrichies de panaches d'acanthe à l'avant et de palmettes d'acanthe nervurées à l'arrière - traverses latérales sculptées |
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Compas en fer richement ouvragés - Intérieur à tiroirs galbés en plan et en élévation - gradin au dessus |
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Boutons ainsi que charnières et serrure en laiton |
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Larges tiroirs intérieurs galbés en plan et en élévation et fines fonçures de chêne |
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Pieds "en escargot" à enroulements d'acanthes sculptées - traverses généreusement chantournées et richement sculptées |
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Remarquable poli de l'acajou |
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Somptueux tablier savamment découpé sculpté d'un ruban plissé noué d'où s'échappent des guirlandes de laurier grainé |
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Riche ornementation de bronze d'origine (poignées de tirage et entrées de serrure) - Entrée de serrure de l'abattant en laiton coulé ajouré |
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Porte du tabernacle galbée fermant à clé à encadrement mouluré et cintré en arc - trappe ouvrant sur la cave - Serrure de l'abattant à 4 pênes |
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Toutes fonçures de chêne massif (dos - tiroirs - planchers intermédiaires - coffre du secret) |
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DOCUMENTATION Quelques autres remarquables scribans bordelais : |
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Ancienne collection Philippe Glédel |
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Quelques exemples de meubles témoignant de l'âge d'or du mobilier bordelais,
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Documentation
: Le meuble de port - Louis malfoy / Les éditions de l'amateur |
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Ancienne Collection Antiquités
Philippe Glédel |
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